Cet essai de philosophie politique, paru en 1948, était devenu quasiment introuvable. Il s’agit là de la première œuvre d’importance publiée par Pierre Boutang (1916-1998), normalien, agrégé de philosophie, disciple de Charles Maurras et membre de l’équipe du général Giraud à Alger, en 1943. Il avait fait la connaissance de Jean-Marie Domenach au début de la guerre. Malgré leurs divergences politiques, les deux hommes se porteront jusqu’à la mort du second une estime intellectuelle qui ira grandissante et donnera lieu à de stimulants dialogues sur France Culture.
La Politique « considérée comme souci » développe l’un des aspects majeurs de la pensée de Boutang, celui de la finitude originelle : « Je nais ici, et non ailleurs, fils d’une famille, héritier d’un nom. » L’homme dont nous parle Boutang n’est pas un être abstrait jeté dans le monde et soumis à une angoisse existentielle irrémédiable. C’est, au contraire, un être social, qui s’inscrit dans des appartenances spirituelles et des communautés naturelles.
Postfacé par l’universitaire franco-israélien Michaël Bar-Zvi, cet essai très accessible et trop méconnu propose également une approche philosophique originale de deux livres majeurs de la littérature occidentale qui nous dévoilent les sources du totalitarisme et éclairent notre souci politique : Les Possédés de Dostoïevski et Les Falaises de marbre de Ernst Jünger.
Jérôme Besnard, France-Forum n°55, septembre 2014