Si David Ben Gourion figure au Panthéon des pères fondateurs de l’État d’Israël, Vladimir Jabotinsky (1880-1940) reste injustement oublié – et pour cause. Grand rival du leader travailliste qui le surnommait « Vladimir Hitler », « Jabo » sera mis au ban post mortem de l’histoire officielle de l’Israël moderne – Ben Gourion allant jusqu’à refuser le rapatriement de sa dépouille en « Erets lsraël » sous le prétexte qu’« Israël a besoin de Juifs vivants, pas de Juifs morts » – et ce n’est qu’après la victoire de Menahem Begin que sa mémoire sera ravivée.
Car ce sioniste historique, fondateur du courant dit « révisionniste » qui réclamait un État juif sur les deux rives du Jourdain, est également le père des groupes d’autodéfense, du Zion Mule Corps, de la Légion juive et du Betar, l’inspirateur de l’Irgoun et du groupe Stern, prémices de l’Herout et du Likoud, cette droite israélienne que Marius Schattner fait naître avec lui dans sa fameuse Histoire de la droite israélienne (1991) (…)
Histoire de ma vie est le « roman public » de ce journaliste russe, cosmopolite et polyglotte, socialiste révolutionnaire devenu infatigable globe-trotter de la cause sioniste, chantre du volontarisme et théoricien sans concession du nationalisme juif et de la lutte armée – sa doctrine du « mur de fer » préconisée face aux Arabes inspire de fait depuis plus d’un demi-siècie la pratique politico-militaire israélienne. Au-delà du seul sionisme, son autobiographie politique est une plongée passionnante dans l’ébullition européenne du tournant du XXe siècle, dont les meilleurs chapitres rappellent Albert Londres.