Richard Millet, bien vivant
Dans une déclaration liminaire à Français langue morte, Richard Millet explique que les notes qui suivent prennent acte d’une agonie, celle de la langue française.
Richard Millet se résigne d’autant moins à cette agonie que la langue, plus qu’en aucun autre pays, a « contribué à la constitution de la France et à [son] esprit » :
« Une langue qu’on parle mal est un miroir où l’on s’efforce de ne pas voir les progrès de la mort sur sa propre figure ».
Il observe, en passant, que « l’écriture ‘inclusive’ est imprononçable, donc idéologique : inutile… »
Millet trouble l’agonie de la langue en écrivant, comme il est à peu près le seul à le faire, « dans un français bientôt illisible pour la plupart des locuteurs de langue française ».
Car son français est davantage soucieux de syntaxe que de vocabulaire riche. En cela, il affirme son respect de la langue qui n’est pas celui d’un ordre figé :
« C’est une affirmation identitaire, comme être Français ou catholique ».
Il dit plus loin :
« Ce ne sont pas tant les mots qui constituent la musique d’un style que le rythme de sa syntaxe ».
Aussi le meilleur moyen de détruire la langue est-il de s’attaquer à la syntaxe.
Richard Millet, qui refuse de décliner, et n’est pas le seul, se « retire dans la langue », ce qui ne veut pas dire qu’il ignore autrui :
« Le style me sépare d’autrui pour mieux accueillir celui-ci dans la justesse de la syntaxe ».
Dans L’Anti-Millet, il rappelle que, depuis 2012, il est mis au ban du monde éditorial, et emploie l’imparfait : « J’étais écrivain »…
Quel crime avait-t-il commis ?
Il avait, « dans un texte dont on n’avait lu que le titre, non pas fait l’éloge d’un tueur norvégien mais suggéré que c’est le discours politico-littéraire contemporain qui a produit un Breivik, car il relève surtout de la propagande qui fait de l’humaniste un collabo du pire ».
En fait, « le parti dévot ne [lui] pardonne pas d’avoir indiqué que l’origine [du] déclin [de la langue et de la littérature françaises] se trouve tout ensemble dans la décomposition de l’enseignement public, dans l’abandon de la langue et dans l’immigration de masse »…
La haine qu’on lui voue est « devenue un tic de langage qui fait de [son] nom le détestable fétiche du vieux mâle occidental, blanc, hétérosexuel, catholique : cela même qu’on décrète responsable des maux de l’“humanité” et qu’il faut noyer dans le relativisme qui baigne la carte du Tendre multiculturel ».
Dans son discours de réception à l’Académie française, le 25 août 1753, Georges-Louis Leclerc de Buffon disait : « Le style, c’est l’homme même ».
En écho, Richard Millet lui répond :
« C’est l’homme même qui meurt en l’absence de style ».
Richard Millet est bien vivant…
Francis Richard, Contrepoints.
• Richard Millet, Français langue morte, suivi de « L’Anti-Millet ».