POLITIQUE D’ABORD
• Précis de Foutriquet, Pierre Boutang, Les provinciales, 192 p., 18 €.
• Le secret de René Dorlinde, Pierre Boutang, Les provinciales, 192 p., 18 €.
Avec ces reparutions de textes du philosophe royaliste Pierre Boutang, très différents par leur facture, on touche à deux passions intellectuelles de l’auteur : le secret, à quoi il consacra sa thèse de métaphysique et la politique considérée comme souci du bien commun. Le Secret de René Dorlinde, que Sébastien Lapaque rapproche dans sa préface de La vie d’Agricola de Tacite, date de 1944. Il s’agit bien ici « d’un conte philosophique à lire comme un roman policier » qui dépeint la perte de repères de l’homme moderne, désormais privé de sa dimension intérieure comme de ses racines spirituelles et temporelles. Méditation sur la survie de l’ordre ancien dans le sociétés totalitaires, Le Secret de René Dorlinde n’a pas été conçu pour rien au moment où Georges Bernanos écrivait La France contre les robots et Georges Orwell son 1984. « Le secret, dans son essence, est contre-révolutionnaire », veut nous y convaincre Boutang. Le Précis de Foutriquet est, pour sa part, un violent pamphlet politique dirigé ouvertement contre la réélection de Valéry Giscard d’Estaing à la présidence de la République en 1981. Son bandeau publicitaire proclamait : « Il faut qu’il parte. » Alors proche de la frange des gaullistes historiques du RPR et du comte de Paris, Pierre Boutang partageait leur aversion profonde pour le locataire de l’Élysée, le rapprochant de la figure d’Adolphe Thiers, lui-même volontiers dépeint par ses adversaires de la Commune de Paris comme un « foutriquet ». Cette charge contre les scandales du libéralisme avancé, produit de la grande bourgeoisie française, était parue chez Jean-Edern Hallier. Elle visait autant le choix d’une politique arabe de la France que celui d’autoriser l’avortement. Il est urgent de relire ce réquisitoire, même dans sa part d’injustice.