Tombeau des numéros anciens
Depuis 2012 la revue ne paraît plus que sous forme numérique (inscription).
93. La légitimité d’Israël sur sa terre face au défi arabo-musulman.
92. « Aimez-vous les uns les autres » : petit essai de théologie politique.
91. « La Fille de Sion » : à propos d’un texte de Joseph Ratzinger.
90. « Le spirituel est charnel » (contre un article rétrograde publié par l’Action française.)
89. « Politique et métaphysique de la langue chez Michaël Bar-Zvi et Pierre Boutang. »
88. « Jérusalem en France. »
87. « Ceci n’est pas un roman de Houellebecq. »
86. « Il faut soulever les Juifs de France. »
47. George Steiner : « Les Logocrates (une note au sujet de Maistre, Heidegger et Pierre Boutang). »
41. Pierre Boutang : « Le dialogue sur la France entre De Gaulle et le comte de Paris. »
Septembre 2000-2011 : Israël et la France
« Tout homme est un prince. » Jabotinsky.
83. Parole et écriture
Le procès de l’écriture s’inscrit dans la plus noble tradition ; il remonte à Platon qui, dans le Phèdre, montre la supériorité de l’enseignement parlé sur l’enseignement écrit, celui-ci n’étant que le « simulacre » de celui-là et faisant la preuve de sa faiblesse, « ses propos étant impuissants à se porter secours à eux-mêmes ». Un texte « écrit sur de l’eau, semé dans une eau noire, au moyen d’un roseau », reste lettre morte, au lieu que celui qui aura été semé dans une « âme appropriée » verra sa semence lever et porter beaucoup de fruits. L’écriture ne serait que le palliatif d’une mémoire paresseuse ; elle voudrait tenir lieu de « l’acte de se ressouvenir de ce que l’on sait déjà » ; elle serait ainsi le complice de la passivité de celui qui trouve meilleur compte à user de notations graphiques, plutôt que de tirer de son fond ce dont son esprit est capable. Socrate, qui jamais n’usa de l’écriture, savait que les plus beaux livres, qu’un maître peut écrire, sont ceux qui trouvent leur teneur, leur logique et leur organicité dans le cœur et l’esprit de ses auditeurs. D’où la fameuse condamnation portée par le pharaon Thamous Ammon contre Theuth, l’inventeur de l’écriture : « Cette invention, en dispensant les hommes d’exercer leur mémoire, produira l’oubli dans l’âme de ceux qui en auront acquis la connaissance; en tant que, confiants dans l’écriture, ils chercheront au dehors, grâce à des caractères étrangers, non point au-dedans et grâce à eux-mêmes, le moyen de se ressouvenir; en conséquence, ce n’est pas pour la mémoire, c’est plutôt pour la procédure du ressouvenir que tu as trouvé un remède » .
(Pierre Magnard, Henri Du Buit, Jean-Noël Dumont.)
82. La mort de Dieu n’a rien de définitif
Dans les textes judaïques l’obéissance pleine de confiance d’Isaac est souvent mise en valeur. Plus encore, Isaac est fréquemment présenté comme la victime expiatoire des péchés d’Israël. Par exemple, lors de Rosh Hashanah et de Yom Kippour, l’on prie Dieu qu’ il accorde Son pardon à la communauté d’Israël au lieu de la faire périr, en raison de l’obéissance d’Isaac au pays de Moriyya. Shalom Spiegel rejette explicitement la thèse qui voudrait qu’Isaac soit une victime de substitution en raison d’une influence du christianisme. Tout au contraire, il affirme que cette idée est passée du judaïsme au christianisme, et que Paul en a été le passeur.
(Richard L. Rubenstein, Alain Suied.)
81. L’Être et l’argent
L’humanité paraît noyée dans l’océan qui monte, retenu par les barrières de l’écriture qui sont en dernière analyse celles de l’avarice, de la peur et de la puissance. Le peuple juif a payé le plus cher la relation à l’écrit sous le masque de l’argent. « Le prix de cette “tenue des livres” (de cette manière de “se fonder sur le livre”) a été, littéralement, monstrueux », a écrit George Steiner, et à propos de ce qu’il appelle « les techniques et disciplines parfois hallucinatoires de l’attention au texte, la mystique de la fidélité au mot écrit, la révérence accordée à ses exposants et transmetteurs » : « Ce sont elles qui ont rendu tant de Juifs et, plus récemment, de Juives si à l’aise dans l’intelligence moderne. Ce sont elles qui ont assuré la prééminence provocante du Juif dans la modernité…». Mais le christianisme, plus ou moins laïcisé en libéralisme (cf. Hegel), n’est pas seulement acteur mais est aussi victime des effets mortifères du primat de l’écrit. La crise techno-scientifique que révèlent les menaces climatiques et la crise financière déclenchée par les « subprimes » et plus récemment encore les émeutes de la faim donnent une idée de l’urgence qu’il y aurait à mesurer et à contrecarrer le caractère purement scripturaire, c’est-à-dire à la fois terriblement fantaisiste et absolument cruel, de l’argent.
(Henri Du Buit, Alain Suied.)
80. Les Juifs et la Révolution française
« Il faut tout refuser aux juifs comme nation, et accorder tout aux juifs comme individus. Il faut qu’ils ne fas-sent dans l’État ni un corps politique ni un ordre; il faut qu’ils soient indi-viduellement citoyens ». Cette formule du comte Clermont-Tonnerre, prononcée lors du débat à l’Assemblée le 23 Décembre 1789 sur la question de la citoyenneté, résume bien l’ambiguïté principale de la Révolution Française à l’égard du judaïsme. Il s’agit ici de placer le Juif dans un exil solitaire, et non plus collectif, remettant en cause le processus historique même du peuple juif et ses fondements religieux.
(Michaël Bar-Zvi, Alain Suied.)
79. Claudel lit Breuil
Claudel rattachait la « colonnade régulière qui des temples classiques enclôt le sanctuaire maçonné » à la « haute futaie primitive », au « profond bois sacré » dont le « défrichement peu à peu a aminci le voile jusqu’à cette rangée unique ». Comme les définitions et les étymologies, les généalogies sont libres, jusqu’à preuve du contraire, lorsqu’elles touchent à l’âme des origines et aux forces qui agissent dans le secret de l’histoire et du langage, que le poète si bien campé sur terre a éprouvées en soi. « Car, depuis le Paradis, et comme Jonas au jour de la pénitence de Ninive, comme Élie dans sa douleur, l’homme toujours a eu pour gardien de sa prière et pour protecteur de ses eaux l’arbre qui, pousse et végé-tation de l’unité, est l’expression de l’Attente dans le témoignage.» Oui les forces obscures devant quoi les anciens « impuissants à les maîtriser» s’inclinaient et gardaient leurs distances, l’Alliance intime et régulière avec le Ciel les a domestiquées, les a dressées à l’intérieur et disposées en tant que témoins majeurs d’un engagement réciproque: « L’Église chrétienne a absorbé le bois mystique » et avec tout son chargement, Arche royale, s’est détachée du port païen, continuant l’aventure de vingt siècles que l’inespérée et supposée rencontre charnelle avec son créateur a permise. « La coupole fermait comme un couvercle, le plein cintre s’arque sous la charge supérieure ; l’ogive est l’effort pour s’ouvrir, la détente du ressort intime. L’édifice jusque là avait reçu sa forme du dehors, réprimé dans son expansion, sous le poids des pierres entassées, solidifié dans sa carapace compacte. Maintenant que c’est de l’intérieur qu’éclate et jaillit le principe de son développement, nous voyons par une loi naturelle la force nou-velle emprunter son expression à la poussée végétative. » La Vie est entrée dans le Temple, la Tente (l’attente ) est intérieure, les piliers désormais sont dedans, « ils conduisent, ils sont la rangée des témoins et leur chœur. Promenoir ténébreux, ave-nues pleines de silences propices aux guet-apens de la grâce », dit Claudel. Mais il faut la force et la constance de l’âme trempée dans la douleur pour que survienne son libre bouleversement – et c’est bien là, à ce coin du sacré bois, à ce carrefour de la grâce et du silence que le travail de Gérard Breuil se tient, serein et magnifique comme le cadeau préparé par un homme mûr pour son petit enfant et qui le surprendra. Breuil: bois taillis, buisson fermé de haies, servant de retraite aux animaux.
(Olivier Véron, installation monumentale de Gérard Breuil à la cathédrale Saint-Jean-Baptiste.)
78. Auto critique
« J’ai honte de notre impuissance, de la honteuse impuissance des chrétiens devant le péril qui menace le monde. » Bernanos, janvier 1940.
(Olivier Véron)
77. Que manque-t-il à notre pays ?
« Et dans la stupéfaction ma langue racontera
ce que l’esprit n’a jamais signifié ce que la mémoire n’a jamais conservé.
La parabole de l’Amour fut envoyée au monde
pour que nous puissions bégayer son nom… »
Edwin Muir
(Alain Suied, Henry Le Bal.)
76. La plus parfaite Union
Les nouvelles forces et les violences de l’islamisme, les conséquences des politiques d’immigration, le processus d’intégration de la Turquie ont révélé aux peuples européens les risques qu’il y a d’abandonner à une bureaucratie délibérément indifférente aux réalités historiques et religieuses – et que les seuls critères économiques obnubilent – la direction de leur destin. Si l’on ne sait plus pour quel peuple, pour quelle nation travaille une démocratie, l’on peut toujours parier que l’islam grâce à elle sera « européanisé », et vite ; mais il est possible que ce soit l’Europe au contraire qui se trouve islamisée.
(Richard L. Rubenstein.)
74. Le Choc de la Liberté
Si la modernité se définit comme « la résolution et le courage de se servir de son entendement sans la conduite d’un autre », le moins que l’on puisse dire est qu’elle n’a pas apporté partout la paix ni la liberté… Il est facile pour l’islam radical, récusant le « nouvel ordre » attendu de la fin de la guerre froide, d’en déclarer la faillite, et de prôner la reprise de son projet universel de conquête. Peut-on s’attendre dès lors à ce que l’islam se saborde lui-même en s’ouvrant à notre conception séculière des droits individuels et de l’État-nation, alors qu’il en éprouve justement les faiblesses – et ne faut-il pas au contraire redouter qu’il se trouve à même de « pacifier » l’Europe, grâce à ceux dont la présence sur son sol signale une autre forme de déroute ? En fait, n’est-ce pas à notre conception de la liberté de se ressaisir pour faire face aux séductions qui gagnent l’Occident ? Les poètes le savent bien qui opposent à la culture du semblant la force d’une quête aussi désespérée que celle d’arbres morts luttant contre le courant du temps et de la destruction.
(Richard L. Rubenstein , Alain Suied.)
73. Pour l’amour de Sion
« Pour l’amour de Sion, je ne garderai pas le silence, pour Jérusalem je n’aurai point de repos, que son salut n’ait éclaté comme un jet de lumière et sa victoire comme une torche allumée » Isaïe – 62. L’essence du sionisme se trouve, mot à mot, dans ces paroles du prophète Isaïe dont chacun des termes pourrait représenter un chapitre du traité philosophique à écrire pour l’expliquer.
(Michael Bar-Zvi.)
72. La Paix contre le pacifisme
Tout le monde désire la paix et pourtant fait la guerre… Si le tyran fait fusiller ses opposants c’est pour être tranquille ! Dans chaque camp il y en a qui parlent de paix le mal tapi au fond du cœur, et c’est avec les mensonges des époques « pacifiques » que s’accumulent la haine et la méchanceté. Le sang des esprits ne se voit pas ! Les monastères mêmes sont des arènes, parce que la contemplation aussi est un combat. L’Église donc autant que la logique admet qu’on prenne les armes pour une guerre juste. Qui se juge en état de légitime défense doit cependant savoir frapper le premier : « le fait est qu’il n’était pas mon meurtrier lorsque je l’ai tué »… Si les principes sont clairs, leur application est toujours délicate et appartient à ceux qui ont la charge du bien commun. « Il ne se peut pas que nos Français soient lâches », pose opportunément, cent ans après Péguy, Fabrice Hadjadj, « mais ils ont oublié qu’ils étaient courageux ».
71. L’Europe dhimmi
Ces derniers mois un front anti-américain et anti-juif s’est ouvertement constitué. L’ennemi de la paix n’est pas Saddam Hussein ! Le parti Baas laisse peu de victimes ! Mais G. Bush et A. Sharon sont de nouveaux « nazis », et Israël n’est que la colonisation d’une terre naturellement arabe et musulmane : simplification redoutable. L’idée d’un « péché originel » de l’Occident expliquant le terrorisme est une autre illusion suicidaire. Elle est dénuée de sens, car la justice selon l’islam n’a rien à voir avec celle de la tradition humaniste, et demande à la limite la disparition complète des « infidèles », rappelle Alain René Arbez. Historiquement l’islam s’est propagé par la force et l’intimidation, auxquelles la croisade ne fut à l’origine qu’une réponse défensive. Le geste de lancer des pierres symbolise la lapidation, qui peu à peu vient hanter l’inconscient d’une Europe désormais réunie par la honte de la seconde guerre mondiale, par l’anxiété et le dégoût du sang.
70. Escale technique dans le Réel
À force de « tuer le Père », de casser le message de la Genèse pour le remplacer par le silence glaçant d’une liberté sans regard (Alain Suied), à force de masquer la responsabilité historique de la société moderne dans la catastrophe du nazisme, l’Europe n’aura pas vu se déployer une idéologie qui exalte à nouveau la destruction des Juifs, et ne se sera guère décidée à la combattre. Lorsque cette idéologie recommande et récompense l’assassinat de civils et le suicide organisé par des « frères », lorsqu’elle exploite le scandale de la présence politique juive en « Palestine » comme machine de guerre contre l’Occident – qu’importe si elle est manœuvrée par Ben Laden ou par Saddam Hussein : s’il est possible de lui enlever la tentation et la puissance que représente un État criminel mais prestigieux pour les musulmans, et doué demain d’énormes ressources – il faut le faire, avant que d’autres (Pakistan, Égypte, Arabie Saoudite) ne basculent dans le camp ennemi.
(Maurice G. Dantec, Alain Suied, Olivier Véron).
69. Que manque-t-il à notre Pays ?
À lire depuis le référendum du 29 mai, tous ces développements, dans Le Monde ou Le Figaro, toutes ces approches, ces analyses, ces commentaires savants… on est pris de vertige. Presque pas un mot sur le fait chrétien, le fait de la civilisation de la Parole faite chair, simple élément réduit à un point de plus en plus excentré du domaine privé. La bureaucratie est devenue l’ultime ciment d’une décohésion généralisée, mais il existe en France un point central à la réalité si dense, si discrète, si humble, que l’appréhender c’est se trouver face à la célèbre « chambre vide » du Palais du Prince de Citadelle, décrite par Saint-Exupéry…
(Henry le Bal.)
68. Le Monde est suspendu au souffle des enfants à l’Écoute de leur maître
La République fut d’abord un régime politique minoritaire, qui permit au parti des lettrés de « contourner » la société ; mais elle a glissé vers la démocratie, elle prétend désormais refléter en tous points la société et s’est fait un devoir de ne la brusquer en rien. On peut voir en cela le couronnement d’une fausse humilité en quête de consensus social. Car l’humilité est bien la vertu que le christianisme avait placée avec raison au cœur de son combat contre le monde païen – racine de tout effort de civilisation et condition de toute vraie création de l’esprit. Mais en la réduisant à une préoccupation sociale dénuée d’aspiration biblique, la société moderne a brisé son propre élan vers les savoirs, et elle a pris le risque de considérer celui des Juifs comme une singularité historique, que sa passion égalitaire n’admet plus.
(Olivier Véron.)
67. Israël et La Nation Française
La dernière grande bataille livrée par Pierre Boutang dans les colonnes de La Nation française (1954-1967) est celle de la guerre des Six Jours. Elle met en jeu l’existence du journal et l’achève. Par une série d’articles presque aussi rapide, aussi audacieuse, et aussi précise que les vagues d’assaut de l’armée isaélienne, Boutang fixe les grands traits de sa position, projette bien au-delà des attitudes défensives d’un christianisme de tradition la ligne de front des temps futurs, et vient occuper en profondeur un territoire où se résume son souci politique et où s’incarne une part de son espérance, à la jointure de l’ordre temporel et de l’esprit.
66. Le XXIe siècle sera théologique et sera
« Je est un autre » dit Rimbaud. Non seulement ma conscience est habitée, mais cet autre est la source de tout au fond de moi. C’est cela qu’expérimente Abraham : ma conscience est un autre en moi, et ma solitude est semblable à celle de l’homme en face de moi, qui représente une avancée possible vers Dieu. Hors cette source commune nous créant moi et lui à son image, ma liberté conduit à la tristesse. Il en est de même pour les nations, affirme Henry Le Bal : la France, fille demeurée de l’Église, s’est éloignée gravement de sa propre nature. En tentant d’exister sans se souvenir de l’autre absolu elle a perdu sa raison d’être. Car la France, mémoire sensible, sensuelle de l’éternité n’a pas pour vocation de servir les seigneurs de l’argent. La terre des lys et de Marie est le royaume d’une jeune fille juive à jamais préservée dans la vraie liberté. C’est à cet héritage commun qu’elle doit tendre, c’est cet avenir deux fois perdu qu’elle doit défendre comme la prunelle de ses yeux. La France, au XXIe siècle, sera l’allié naturel d’Israël – ou ne sera pas.
65. La France vient du fond des Âges
« Elle vit. Les siècles l’appellent. Mais elle demeure elle-même au long du temps… Y habitent des peuples qu’étreignent, au cours de l’Histoire, les épreuves les plus diverses, mais que la nature des choses, utilisée par la politique, pétrit sans cesse en une seule nation. Celle-ci… revêt un caractère constant qui fait dépendre de leurs pères les Français de chaque époque et les engage pour leurs descendants. À moins de le rompre, cet ensemble humain, sur ce territoire, au sein de cet univers, comporte donc un passé, un présent et un avenir indissolubles. Aussi l’État, qui répond de la France, est-il en charge, à la fois de son héritage d’hier, de ses intérêts d’aujourd’hui et de ses espoirs de demain… ». C’était De Gaulle, mais en refusant de se souvenir de ses origines l’État français se coupe de la vérité de l’histoire de France, donc de la réalité et de l’avenir. Et c’est cela qui enferme peu à peu dans l’impuissance les Français déjà détenus dans la tristesse. À quel point leur destin accompagne et prolonge la lignée de David, à quel point il dépend de ce rempart contre les nouveaux totalitarismes, c’est ce qu’indiquent cette origine et cette histoire.
(Henry le Bal.)
64. L’Élection d’Israël
Le déicide est d’emblée un judéocide. L’antisémite en a l’instinct, le rationalisme égalitaire échoue à le reconnaître : le Verbe s’est fait Juif et il a choisit le peuple de Moïse pour instrument de son sacrifice divin. L’Élection livre le monde à la transcendance. Heureuse efflorescence de la tige de David qui permet à n’importe qui de revêtir l’israelitica dignitas, délicatesse de ce peuple demeuré dans une fidélité comme excessive à la promesse, fautif de n’oser prendre pour lui sa réalisation, et qui nous permet d’espérer avec lui en hériter…
(Fabrice Hadjadj.)
63. Le Droit à la Terre
Un verset revient à chaque mort en Israël : « Une terre qui dévore ses habitants ». Couvrir la terre de honte détruit le désir de l’habiter. L’attachement ne peut plus dépendre d’un sentiment personnel mais d’une fidélité envers ce à quoi nous sommes reliés avant toute décision. C’est pourquoi le droit à la terre passe par l’épreuve commune et la déréliction de l’exil, qui fonde la responsabilité envers la nation. Porteuse d’une forme d’échec, la terre – ni asile ni possession – se révèle demeure, un projet qui ne s’écrit que dans le temps, explique Michaël Bar-Zvi. C’est ce lien qui est essentiel : se souvenir du lieu où nous allons. Accepter la dispersion, à l’inverse, c’est perdre son amour, ruiner la dimension d’exil qui rend possible l’appartenance. Dans ce numéro une étude de G. Chaufour rappelle aussi que l’un des pères du racisme et de l’antisémitisme s’est nommé : Voltaire.
62. Si tu te fais vraie
. …Lorsque par une sorte de réconciliation avec son origine, le peuple dont nous avons tiré la substance de l’histoire rompt avec la condition d’exil où son être s’oubliait ; lorsqu’il décide de se tenir authentiquement comme juif en face de l’autre, de ne plus « faire rapidement ses valises », et de se défendre dans les limites de la guerre légitime : on ne peut se contenter de le soutenir du bout des lèvres, ou le lâcher à l’occasion – car il ne peut se passer d’alliés qui ne soient pas juifs et il faut témoigner en acte à ses côtés de la vérité de notre histoire commune face aux mensonges de notre époque.
(Michaël Bar-Zvi, Pierre Boutang et le sionisme)
61. Judaïté de la Littérature
Pauvre mère dolente, à l’avance sacrifiée, donnant sa vie pièce à pièce pour ses enfants, D- ne veut pas notre malheur… et pourtant quelle misère ! L’homme voyage en aveugle – poussé par la soif de connaître, il est étranger sur la terre, errant, inassouvi : parce que « nous sommes Hébreux » ! On ne peut pas dire que la foi nous fasse défaut, puisque cette vie nous la vivons. Seulement nous avons mieux à faire que de chercher ici le bonheur en ses formes affligeantes (un peu de doux mêlé de tant d’amer), et nous sommes pleins de l’ardent désir de voyager. « Nul n’est chez soi ». Mais naviguer est harassant, et tout être humain doit pouvoir intérieurement se justifier : vaut la peine ce qui mène quelque part – nous en persuader est l’essence même de la littérature, c’est pourquoi Ghislain Chaufour appelle « juive » une telle littérature.
60. La Nouvelle Alliance (entre Juifs et chrétiens)
Pour la première fois Israël devient objectivement l’enjeu central de l’histoire. Il appelle les chrétiens à un engagement clair. Les différends théologiques n’ont pas trouvé de solution, mais le souci politique d’Israël peut aujourd’hui réunir les peuples que ceux-ci avaient séparés. De toute façon la messe (le sacrifice de la nouvelle Alliance) nous a lentement incorporés à la famille d’Abraham : « marcher ensemble » c’est lui appartenir.
(Michael Bar-Zvi, Olivier Véron.)
59. Pour le Grand Jihad / décembre 2001
Si la mini-jupe et le décolleté voilent le visage, autant que la bourka des Talibans, c’est parce que le volontarisme violent et idéologique de nos « Lumières » ressemble fort au fanatisme : il nie « l’opacité des choses ». Le désespoir des attentats du 11 septembre a eu le mérite de nous forcer à réfléchir avec nos entrailles sur l’au-delà – mais aussi avec une foi peu discernable de la frousse. Il fallait leur opposer l’audace d’une véritable riposte théologique, montrant la voie du vrai combat spirituel, notre grand Jihad. Fabrice Hadjadj s’en est emparé : empruntons-la, ou bien mourons de peur.
Mars 93-septembre 2000 : métaphysique des mœurs
« Nous sommes tous des marquis. » Péguy.
58. Israël signe de contradiction / septembre 2000
L’homme européen, en un sens qui n’a pas été envisagé à Rome, ne se trouve pas éminemment en Europe, ou n’y est pas éveillé. Il est, paradoxe et scandale, en Israël ; c’est en Israël que l’Europe profonde sera battue, «tournée», ou gardera, avec son honneur, le droit à durer.
(Pierre Boutang, Olivier Véron.)
56-57. Le Poète et l’Histoire
L’exil, l’exil n’est pas notre royaume. Le Verbe s’est incarné. Mais le temps gémit d’être privé du souffle souverain. Poésie que tout ceci ? Non, Histoire ! Chevaliers désarmés d’un royaume humilié, héros mendiants, hères chez vous : Soyez ! Voilà votre impératif, il emporte toute la terre. Vous êtes le sel de l’Histoire, son langage, sa vocation, ses actes. Poésie ? Non, histoire !
(Henry Le Bal.)
54-55. La Vocation historique de Léon Bloy
Ce n’est pas en homme de lettres que Bloy descendit en littérature, mais en partisan violent de la réversibilité des mérites : afin de dynamiter le mensonge qui fait croire que l’histoire, par les lettres et l’argent, appartient aux puissants, à ceux qui réussissent.
(Christophe Chaléat.)
52-53. Les Lettres et le Temps
Il y eut les petites lettres de Pascal, il y eut celles de Péguy. Pour que la lettre devienne acte, il faut lire avec une intensité telle qu’on retrouve le moyen d’agir. La seule vraie force libératrice est la vertu active et personnelle d’attention. Un réseau de résistance ne se constitue à partir d’éléments successifs qu’où existe une force d’arrêt.
(Olivier Véron.)
51. Mon âme refuse le réconfort
Provinciale authentique de Fabrice Hadjadj sur la bêtise du raffinement technologique en vogue. Moins poli que Pascal : « un monde de porcs », aurait dit simplement Léon Bloy.
50. La Politique considérée comme Souci
Préface du premier livre (1948) de Pierre Boutang : les plus belles pages jamais écrites sur l’enracinement des questions décisives dans une âme d’enfant, et la manière dont elles le révolutionnent à l’âge d’homme pour le lier à jamais au destin de son pays.
48-49. Danse de la Nuit
Danse macabre (un genre qui nous revient du Moyen-âge) par Stéphane Giocanti, qui regarde les formes majestueuses de son histoire de France se tordre, se disloquer, et s’avilir jusqu’au tableau de toute une nation entraînée vers la mort misérable. Typographies de Christophe Lamborot et frises de Gérard Breuil se trouvent elles aussi superbement entraînées.
47. George Steiner : « Les Logocrates (une note au sujet de Maistre, Heidegger et Pierre Boutang). »
Enfin traduit en français, le célèbre texte de George Steiner, où à partir des œuvres de Pierre Boutang (ce texte scella le début de leur amitié), Joseph de Maistre, et Heidegger, il pose la question des conséquences politiques d’une soumission véritable à l’impérieuse exigence du Logos
46. Trois lettres brèves de Port-Royal
Permanence de la charge la plus subversive jamais portée en France par l’idée même de tradition.
(Olivier Véron.)
45. En dépit de la voix haute et salutaire
« … qui pénètre si vivement toutes choses sur la terre et dans le ciel, des efforts insensés furent faits pour établir une démocratie universelle ». Stéphane Giocanti illustre la valeur hic et nunc de cette phrase d’Edgard Poe.
44. Pascal, trois portraits de Rois
Une minutieuse lecture, par Frank Menubarbe de la figure royale chez Pascal et comment il la réhabilite ; mais surtout : un texte probablement dicté par l’Esprit-Saint en personne, et qui concerne le mystère de l’Église dans la pauvreté même de son destin.
42-43. La France seule contre les Robots
« Le besoin le plus important et le plus méconnu de l’âme humaine », l’enracinement est la cause pour laquelle Charles Maurras, Simone Weil, et Bernanos nous ont appelés à la révolte sacrée, et ce pour quoi ils s’étaient pour une fois, la seule, trouvés d’accord. (Nicolas Bauquet, Stéphane Giocanti, Guillaume de Tanoüarn, Olivier Véron.)
41. Pierre Boutang : « Le dialogue sur la France entre De gaulle et le comte de Paris. »
A la lumière des documents nouvellement publiés, et de l’espérance invincible de toute une vie jetée dans la question, Pierre Boutang analyse la vocation monarchique, mystérieusement manquée, de la cinquième république.
39-40. La croisée des chemins ou : du Pape
Un effort pour faire le récit de la conversion intime d’une âme, à travers le chaos et la guerre intestine des opinions contraires, à l’ordre de la plus raisonnée, de la plus attachante et de la seule subversive des traditions.
(Olivier Véron.)
37-38. Du principe d’autorité
La révélation presque brutale (intransigeante a-t-on dit) du principe dont dépend la quête de toutes les vérités. Des textes qui émergent d’un limon qu’ils transpercent de lumières magnifiques.
Mars 90-septembre 93 : 36 premiers numéros
« L’histoire tout entière, comme si elle était vécue et soufferte personnellement. » Nietzsche.
36. Contre les philosophes (Eugenio Montale)
35. La corruption
34. Compte-rendu d’exercice (Olivier Véron, Philippe Nadouce).
33. La nuit dans les regards (Pierre Boudot, Éric Burmann).
32. Sous peine de mort (Patrick Chavardès, Gérard Breuil).
31. Pourquoi nous ne faisons pas de numéro spécial (Philippe Nadouce, Pierre Rottenberg).
30. Marc-Édouard Nabe est-il un pétard mystique ? (Olivier Véron.)
29. La table ronde imaginée (Xavier Grall).
28. Les morts qu’en moi tu renouvelles (Jean-Marie Turpin, Jean-Noël Dumont).
27. Il ramènera le cœur des pères vers les fils.
26. La défaite de la parole (Jean-Pierre Bobinot, Claudio Flores).
25. Nous sommes tous des marquis (Charles Péguy).
24. Celle que vous étiez (Patrick Chavardès).
23. La matérialisation humiliante de l’impuissance arabe.
22. La paix perpétuelle (Angel Gutierrez).
21. Les soldats de la charité (Emmanuel Eydoux, Éric Burmann).
20. Le pankratiaste à fond dans le lard (souvenirs d’un jury d’arts plastiques, Henri Bottin).
19. Satire de la dictature (Pierre Boudot).
18. L’arme absolue (Olivier Véron).
17. La question libanaise (Olivier Véron).
16. La nuit obscure (Pierre Boudot, Christian Bobin).
15. Guerres mondiales, suite (Pierre Boutang, Alexandre Zinoviev).
14. Contes de Noël (Claudio Florès).
13. La mort est rouge (Patrick Chavardès, Dominique Daguet, Jean-Marie Turpin).
12. Coups de sang (Jean-Noël Dumont, Serge Rivron).
11. J’aime la russie soviétique (Pierre Boudot).
10. Les mandarins sont revenus, chassez-les ! (Pierre Boudot).
9. Laisse partir mon peuple (Ange-Mathieu Mezzadri, Jean-Noël Dumont).
8. Journal qu’on trouvera dans une poubelle.
7. L’idiot international (Jean-Edern Hallier).
6. Apocalypse (Jean-Marie Turpin).
5. Nous ferons une révolution (G. K. Chesterton).
4. Les preuves fatiguent la vérité (Serge Rivron).
3. La tempête de Nicolas Machiavel (Pierre Boutang).
2. Actualité d’Adam.
1. Je vous ai portés sur les ailes des aigles / mars 1990.